deux bébés dormant ensemble - illustration syndrome jumeau perdu

Le syndrome du jumeau perdu

Depuis plusieurs mois, j’assiste à une recrudescence de cas de « jumeaux perdus » et j’avais envie de vous partager un petit bout de mes observations, mon expérience personnelle mais aussi un résumé de mes lectures à ce sujet

Beaucoup d’entre vous se reconnaitront sûrement dans les caractéristiques que je m’apprête à développer. Tous n’auront pas pour autant perdu leur « moitié » car ces « symptômes » peuvent s’expliquer par de multiples autres causes. Certains, sans doute, sentiront en leur for intérieur qu’ils l’ont « toujours su » et qu’il ne fait nul doute qu’ils étaient accompagnés dans le ventre maternel.

La découverte d’un JP (jumeau perdu) peut parfois faire l’effet d’un tsunami intérieur… Aussi, je vous invite à prendre le temps de ressentir, d’écouter les manifestations de votre corps, d’observer vos rêves… et de venir vérifier auprès d’un thérapeute compétent dans le domaine.

Sans doute ignoriez-vous qu’une grossesse sur 10 (certains parlent même d’1/8) est gémellaire. Et ce depuis toujours…

L’absence d’échographie à l’époque ne permettait pas de vérifier la chose mais aujourd’hui, me diriez-vous, comment est-ce possible ?

Et bien cela s’explique de différentes manières :

Souvent, un des deux embryons s’en va très tôt, avant même que la première écho ait pu avoir lieu. La future mère peut alors avoir quelques pertes de sang ou n’avoir strictement aucune manifestation et dans ce cas l’embryon mort soit sera « intégré » au second embryon soit il « s’assèchera » et sortira en même temps que le placenta sous la forme d’une masse dure et séchée lors de l’accouchement. Une sage-femme m’a expliqué un jour que n’étant pas formés à ce phénomène, les professionnels de santé ne tiennent pas compte de la présence de cette masse ou n’en parlent pas pour ne pas inquiéter la mère.

Il arrive aussi qu’un des embryons cache l’autre au moment de l’échographie et meurt plus tard, en « manifestant » ou non sa présence.

J’ai accompagné il y a quelques temps une femme de 40 ans environ qui, suite à l’opération d’un kyste ovarien, a découvert (enfin les analystes des laboratoires bien sûr) la présence de traces de dents et de cheveux dans le kyste. Elle avait intégré en elle et vécu avec son jumeau perdu (dont elle connaissait déjà l’existence suite à un travail en développement personnel) depuis toutes ces années…. Ce cas est loin d’être isolé !

J’ai moi-même perdu, non pas un mais deux jumeaux dans le nid douillet maternel. Très jeune, mes parents m’en ont parlé afin que cela ne reste pas caché et pour me permettre d’être le moins possible impactée par cette perte.

Pourquoi parler de perte pour un embryon de quelques centimètres à peine ?

Cela m’amène à vous expliquer les conséquences qu’amène la disparition de ce jumeau pour celui que l’on appellera le « survivant ».

Dès la conception, l’embryon ou l’âme développe une forme de conscience. Bien évidemment, il ne réfléchit pas comme vous et moi mais certains sens sont déjà développés et avec eux une certaine capacité à ressentir des émotions.

Imaginez donc ce bébé en devenir, au chaud, dans l’utérus de celle qui sera sa mère… Pendant quelques jours, quelques semaines, parfois même quelques mois, il évolue au contact d’un autre. Ils se touchent, se ressentent, se tiennent chaud. En quelque sorte, ils forment une « équipe » et on peut imaginer qu’il est toujours plus « rassurant » d’arriver à deux dans ce monde parfois hostile.

Et puis, un jour, tout s’arrête. Le cœur de l’autre ne bat plus, ce si petit corps se nécrose peu à peu, on ne sent plus sa chaleur, ni son doux contact. C’est le néant. Le silence. La solitude. Pour certains jumeaux « survivants », passer le reste de la grossesse en présence de cet être mort restera un traumatisme à vie (jusqu’à le découvrir et le travailler, évidemment).

Le moment tant attendu arrive… après plus ou moins 9 mois d’attente, bébé pointe le bout de son nez. Il découvre ce monde froid, des lumières éblouissantes, des bruits parfois invasifs, de nouvelles sensations. La transition est souvent violente, aussi entouré et aimé soit-il. Attention, la naissance d’un petit être reste toujours un moment heureux (et de plus en plus vécu en conscience par les parents !) mais elle n’en reste pas moins brutale pour le nouveau-né.

Bébé grandit mais peut-être pleure beaucoup, se montre agité comme si une peine immense demandait à être exprimée (tous les bébés qui pleurent beaucoup n’ont pas perdu un jumeau, c’est une option parmi d’autres !). Sa « moitié », celui ou celle avec qui il imaginait faire le grand saut n’est plus là et il le sait et le ressent au plus profond de ses tripes.

Enfant, adolescent puis adulte, il pourra, inconsciemment manifester de nombreux « symptômes » traduisant l’absence, la perte ou encore la recherche de cet autre.

Cette liste de symptômes n’est pas exhaustive, mais je vais tâcher d’être la plus précise possible :

  • Le « jumeau survivant » peut rencontrer une grande peur de la mort comme si cette dernière venait réveiller chez lui le souvenir douloureux de cette perte précoce
  • Crises de panique, d’angoisses sans raison apparente
  • Grincements de dents, ongles rongés, troubles digestifs, sensations de brûlures internes… manifestant un stress sous-jacent
  • Sentiment de solitude, même au milieu d’une foule, on ne trouve jamais personne qui nous comprenne vraiment
  • Problème de place, de légitimité – A quoi bon prendre sa réelle place si l’autre n’est pas là ?
  • Syndrome du sauveur – On cherche à aider, sauver la terre entière pour se « racheter » de n’avoir pas pu sauver son jumeau
  • Relations affectives et/ou amoureuses complexes – On cherche dans l’autre ce jumeau disparu, on attend de notre conjoint(e), ami(e), qu’il/elle remplace cette moitié qui nous manque tant et finalement, on se rend compte que l’autre « n’est jamais assez bien »
  • Sentiment de vide intérieur, comme si on n’était pas entier
  • Sentiment de nostalgie, de tristesse quasi-permanent, un vague à l’âme qu’on ne s’explique pas rationnellement
  • Dépendance affective – on cherche à fusionner sans cesse avec l’Autre quitte à l’étouffer, dès lors qu’il se détourne de soi, on se sent abandonné, rejeté, trahi encore une fois
  • Difficultés à oser briller, être mis(e) en lumière – On n’a pas le « droit » de réussir puisque l’autre n’est plus là
  • Absence de joie, d’élan de vie, on se traîne dans sa vie – « A quoi bon ? »
  • Refus voire rejet de tout contact physique avec des inconnus, davantage encore dans des endroits clos (ascenseur, etc.) – Ce contact peut rappeler celui du jumeau mort
  •  Jalousie maladive – « si l’autre m’abandonne pour un/une autre, je ne m’en remettrai pas, j’ai déjà ressenti ça ».
  • Multiplication par 2, on achète tout en double « au cas où », on mange pour 2 ou on en laisse toujours un peu dans l’assiette comme pour laisser sa part à l’autre
  • Echecs professionnels ou personnels répétés – « Si je réussis, je vais trahir mon jumeau/ma jumelle»
  • Manque constant de « quelque chose » dans notre vie que l’on n’identifie pas, insatisfaction permanente
  • Difficultés à avoir des enfants ou peur panique de les perdre – la grossesse ou la naissance d’un enfant réactive cette peur de perdre qui vient des tripes
  • Envie de mourir, on prend des risques (sports extrêmes, mises en danger de soi, de sa santé, etc.) pour rejoindre l’autre plus vite.

J’ai coché bon nombre de ces critères pendant longtemps et pour être tout à fait honnête, j’en vis encore certains. Sont-ils liés à la perte de mes jumeaux ou à d’autres blessures ? Je l’ignore ! Mais je garde toujours à l’esprit que ces pertes ont laissé en moi des cicatrices à vie…

J’ai ri lorsque j’ai fais le lien, grâce à une psychothérapie il y a une dizaine d’années, entre la perte de mes 2 jumeaux et la présence du chiffre 3 dans ma vie. Qu’il s’agisse de mes relations amoureuses, amicales, des dates importantes de ma vie, de mes choix de vie (jusqu’à un tatouage que je me suis fait avec 3 oiseaux ou la découverte de 3 anévrismes dans mon cerveau)…. ce 3 (ou le 12… 1+2 = 3) était finalement presque toujours là… comme un clin d’œil pour me ramener à mes origines et à ces quelques semaines passées en compagnie de ma jumelle et mon jumeau…

J’aimerais revenir et m’arrêter sur un point crucial que, très souvent, j’ai observé chez les jumeaux survivants : la culpabilité ! Et qui dit culpabilité dit notion de sacrifice et/ou d’auto-sabotage, autodestruction. Ca vous parle ? Et bien à moi, OUI !

Outre la culpabilité de n’avoir pas pu sauver ce jumeau, le survivant souffre souvent (même inconsciemment) de cette question existentielle : pourquoi moi et pas lui ?

Pourquoi suis-je en vie et pas l’autre ? Suis-je responsable de sa disparition ? Ais-je pris trop de place ? Trop mangé de liquide amniotique ? Est-ce que je lui ai donné un coup qui l’aurait tué ?

Toutes ces « prises de tête », conscientes ou non, bien qu’entendables sont inutiles. Car ces hypothèses sont peu probables d’après le corps médical.

Sur un plan plus « spirituel », j’ai la croyance que cette âme avait choisi de repartir. Peut-être avait-elle décidé d’accompagner le « survivant » un temps comme pour le soutenir, peut-être avait-elle un autre chemin à suivre ailleurs, peut-être était-ce nécessaire pour le « survivant » de vivre cet abandon ou cette trahison dès le départ pour réactiver une blessure que son âme était venu vivre… Peut-être…

Toujours est-il que lorsque cette culpabilité est gravée dans nos cellules, elle fait mal et peut conduire à des comportements et des choix de vie extrêmement destructeurs. On peut se détruire, à travers des addictions, une mauvaise hygiène de vie, des relations toxiques. On peut aussi dévouer sa vie aux autres comme pour racheter une faute, se sacrifier à son propre détriment, y laisser son temps, son énergie, sa santé, sa vie…

Alors, quel est l’intérêt de tout ça ? Quel est le sens d’aller explorer ces choses du passé ?

Et bien justement… les faire remonter à la surface ! Les mettre en lumière ! Les nommer ! Les conscientiser ! Car si une blessure comme celle-là existe à l’intérieur de vous, vous aurez beau mettre toute la volonté du monde pour la fuir, la nier, la combattre… elle reviendra, encore et encore.

Une fois encore, ce n’est parce que vous vous reconnaissez dans plusieurs de ces critères que vous avez automatiquement perdu un jumeau. Mais statistiquement, 1 grossesse sur 10, il est probable que vous soyez dans ce cas.

 Et si tel est le cas, vous pouvez choisir de continuer à faire « comme si de rien n’était ».

Ou vous pouvez décider de reconnaître l’existence de ce jumeau perdu. De lui redonner sa juste place pour vous permettre de prendre aussi la vôtre.  De libérer cette âme qui, possiblement, est toujours accrochée à vous et vous « freine », vous ralentit dans votre évolution. De nommer ce frère ou cette sœur qui n’a pas pu venir et de lui attribuer un prénom.

Après la prise de conscience vient le temps de l’intégration, d’une forme de deuil, puis la guérison.

Si vous décidiez d’entreprendre un travail dans ce sens, sachez que vous trouverez de nombreux outils et thérapeutes susceptibles de vous accompagner. Parmi eux, l’hypnose, le rebirth, la psychanalyse corporelle, la kinésiologie, les constellations familiales.

La référence dans le domaine (à ma connaissance) est le livre écrit par le couple AUSTERMANN, « le syndrome du jumeau perdu ». Tous deux se sont penchés pendant des années sur ce phénomène et expliquent, de manière parfois très poussée et scientifique les différents aspects de ce processus.

Pour certaines personnes, la découverte d’un jumeau perdu est synonyme de révélation et peut transformer leur vie. J’ai déjà entendu l’une de mes patientes me dire, les yeux remplis de larmes « mais c’était ça alors que je cherchais depuis toujours et qui me faisait tant souffrir? Je vais l’aimer, l’aimer comme un fou ce jumeau. J’ai besoin de vivre maintenant ».

Oui, parfois cela suffit à impulser un nouveau souffle de vie car on peut apprendre alors à vivre pour soi et avec soi…

J’espère de tout cœur que cet article aura nourrit certains d’un point de vue personnel ou intellectuel et qui sait, pour d’autres, aura – t-il peut-être été une révélation… une porte ouverte vers de nouvelles aventures…

Mon frère jumeau s’appelle Adam et ma sœur jumelle Juliette. Ce sont les premiers prénoms qui me sont venus, sans réfléchir. Les nommer ici me remplit d’émotions. Et c’est une belle façon de leur rendre hommage et de leur rappeler, là où ils se trouvent, que je ne les oublie pas.

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